Type de document : Rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER)
Auteurs : Bruno Gadoud, Philippe Seinger
Résumé : La production de lapin de chair est à plus de 80% réalisée en Asie et pour 10% en Europe de l’Ouest. La France est le 4ème producteur mondial, le 3ème européen.
La production française est réalisée à plus de 90% au sein d’élevages professionnels. Très structurée et technique, elle est organisée au sein d’une interprofession (amont, producteurs, abatteurs) qui s’est dotée d’un plan de filière 2018-2022, très complet. La production issue de l’Agriculture Biologique existe mais représente très peu d’élevages et des volumes minimes. Le lapin est un animal particulièrement prolifique mais très sensible à de nombreuses maladies à forte mortalité, dont la VHD. Le recours à la vaccination et à la biosécurité a permis de surmonter les dernières épizooties. La démédication, notamment la diminution du recours préventif aux antibiotiques, est largement engagée. La production et la consommation diminuent régulièrement depuis plusieurs décennies. Les enjeux du renouvellement et du rajeunissement des consommateurs de viande de lapin sont donc capitaux.
Comme d’autres productions animales hors sol, la cuniculture va être confrontée à une interdiction de l’élevage en cages. Des solutions de logements alternatifs existent déjà pour la conduite de l’engraissement des lapereaux, en revanche la recherche pour les reproducteurs, en particulier les lapines, doit être poursuivie.
En premier lieu, les missionnés recommandent de créer ou de transformer les logements des lapins à l’engraissement en parcs collectifs, plus favorables au bien-être des animaux, afin qu’à proche échéance au moins 30% de la production commercialisée soient issus d’élevages en logements alternatifs. Les autres éleveurs pourront suivre dans un deuxième temps. Une fois que ce mouvement, déjà initié, aura atteint ce seuil, une communication plus large et plus variée pourra se développer pour cette viande blanche de bonne qualité nutritionnelle.
Il faudra alors s’appuyer sur des abatteurs-transformateurs motivés et toute structure voulant s’impliquer à leurs côtés comme l’Interprofession Volailles, la distribution, les collectivités territoriales et l’Etat.
Le coût de cette transformation en logements alternatifs à la cage dont l’amortissement pourra être long devra être « partagé » entre les acteurs de la filière, producteurs, transformateurs et
distributeurs, sans oublier de possibles financements européens. La loi EGALIM donne le cadre de l’indispensable contractualisation de ce partage de coût.
Le succès du renouvellement de la génération d’éleveurs amenés à cesser leur activité à moyen terme dépendra de la capacité à attirer de jeunes éleveurs qu’il faudra orienter, aider et former à la conduite de ces ateliers d’élevages cunicoles.
L’élevage de lapins de chair présente de nombreux atouts comme la technicité, des cycles de production courts, des animaux faciles à manipuler, des dimensions standards, un faible impact environnemental, la non-concurrence avec l’alimentation humaine…
Pour séduire les consommateurs et les professionnels de la restauration afin de maintenir la demande à un niveau satisfaisant, la profession devra s’orienter vers des produits plus faciles à préparer, accompagnés de recettes simples et rapides pour de nouveaux consommateurs informés et rassurés par une alimentation saine et diversifiée. Il sera néanmoins nécessaire de rester dans des fourchettes de prix compatibles avec les budgets des ménages.
Les 7 recommandations formulées dans ce rapport s’adressent respectivement à l’interprofession, aux éleveurs, aux groupements de producteurs, aux abatteurs, aux transformateurs, à la distribution ou/et aux pouvoirs publics. Elles visent à conforter des évolutions à même de donner un avenir à la filière lapin de chair.
Liste des recommandations
R1. Pour l’interprofession et plus particulièrement les abatteurs et les groupements de producteurs : la filière doit s’engager résolument dans des solutions alternatives éprouvées pour le logement des lapins en engraissement (parcs collectifs et jardins d’hiver par exemple). Les éleveurs doivent continuer d’être soutenus, techniquement et financièrement par les abatteurs, pour la transformation, l’extension, la reprise voire la création d’élevages en logements alternatifs. L’objectif d’atteindre, à une échéance proche à préciser, 30% de la production commercialisée issue d’élevages en logements alternatifs pour l’engraissement devrait être fixé car c’est une étape préalable nécessaire pour relancer la consommation et l’installation de nouveaux éleveurs.
R2. Pour l’interprofession : il faudrait ouvrir l’interprofession (CLIPP) à la Grande Distribution (création d’un « collège distribution ») ou développer les échanges avec la Grande Distribution au sein du comité de liaison actuel pour construire entre interlocuteurs motivés une vision partagée et définir ensemble des actions de promotion de la viande de lapin
R3. Pour les industriels : améliorer le travail avec les collectivités territoriales et la communication avec les cuisiniers des établissements afin de développer les parts de marché dans la restauration collective.
R4. Pour les professionnels de la filière cunicole française : poursuivre le rapprochement et développer les travaux communs avec les professionnels de la filière cunicole des autres pays européens.
R5. Pour les producteurs, les transformateurs et les enseignes de la Grande Distribution: développer la contractualisation entre éleveurs, abatteurs et distributeurs dans le cadre de la Loi EGALIM 2 en se basant sur un ensemble large d’indicateurs analysés et acceptés par toutes les parties prenantes pour définir les critères de révision du prix.
R6. Pour la DGER : inciter les DRAAF à identifier un établissement référent par région cunicole et à ouvrir les établissements pour sensibiliser leur public à cette production afin de contribuer au renouvellement des générations d’éleveurs.
R7. Pour la DGPE : veiller au niveau européen à la prise en compte des élevages de lapin dans les mesures d’accompagnement financier qui seront prévues dans le règlement européen annoncé pour 2023 pour la transformation des bâtiments actuels d’élevage et leurs équipements en logements respectueux des nouvelles normes européennes en matière de bien-être animal.