Type de document : article publié dans The Conversation
Auteure : Julie Chiron
Extrait : Une proposition d’étiquetage visant à informer les consommateurs du BEA des animaux d’élevage a été soumise au ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire, elle a également été présentée à l’Agence d’évaluation du risque européenne (EFSA : autorité européenne de sécurité des aliments). […]Le bien-être animal, une notion qui a évolué […]Prendre en compte le ressenti de l’animal
[…] L’Anses a […] proposé en 2018 sa définition du BEA intégrant la considération individuelle, les aspects positifs et les capacités de conscience et de sensibilité des animaux : « Le bien-être d’un animal est l’état mental et physique positif lié à la satisfaction de ses besoins physiologiques et comportementaux, ainsi que de ses attentes. Cet état varie en fonction de la perception de la situation par l’animal. »
Vers un étiquetage mesurant le bien-être animal
[…] La décision d’étiqueter les produits animaux destinés à la consommation, comme proposé par la Commission européenne (CE) en 2020 dans sa stratégie Farm to Fork (de la ferme à la fourchette), permettrait transparence et harmonisation des étiquettes BEA des produits circulant en Europe. Aujourd’hui, des étiquettes relatives au BEA ont été développées dans tous les pays de l’UE, le rapport de la CE Study on animal welfare labelling en dénombre 51 couvrant toutes les filières de productions animales. En France, il existe une seule étiquette spécifique du BEA créée par l’AEBEA (Association pour l’étiquette bien-être animal). Cependant, aucune législation européenne ne régit les allégations ou l’étiquetage en matière de BEA. Eu égard à la multiplication des étiquettes faisant figurer de telles assertions, l’Anses a estimé utile de formaliser les lignes directrices scientifiques sur lesquelles devrait reposer un référentiel d’étiquetage et ses protocoles d’évaluation du BEA. Ces travaux s’appuient sur la définition du BEA précédemment développée. Ces lignes directrices s’adressent aux scientifiques et aux parties prenantes qui projettent de construire un référentiel d’étiquetage pour une catégorie d’animaux donnée. L’étiquette produite sur la base de ce référentiel s’adresse au consommateur qui doit pouvoir, en toute transparence, consulter le référentiel d’étiquetage qui lui est lié.
Prendre en compte les élevages de sélection
Aujourd’hui, les systèmes d’élevage sont très spécialisés et organisés en grandes filières de production. Le terme « filière » regroupe un ensemble d’activités intervenant sur un produit, depuis sa production jusqu’à sa vente au consommateur. Les denrées alimentaires d’origine animale concernées par l’étiquetage sont issues d’animaux qui appartiennent majoritairement à l’étage de production de la filière concernée et dans une moindre mesure à l’étage de sélection-multiplication. Pourtant, les animaux élevés pour la sélection génétique ou la multiplication sont issus de choix génétiques réalisés pour et par la filière, ils grandissent et vivent dans des élevages avant d’être transportés puis abattus pour fournir eux aussi des denrées alimentaires. […]Conformément à la définition du BEA, chaque protocole d’évaluation tient compte du fait que le BEA est individuel (pour un animal) et multidomaine. Six domaines sont définis : génétique, alimentation, environnement, santé, interactions comportementales et état mental. À chaque domaine constitutif du BEA correspondent des critères, auxquels sont associés des indicateurs dont la mesure va permettre l’attribution d’une valeur. Au total quatorze critères d’évaluation ont été définis. Un score global de BEA sera obtenu par agrégation des mesures d’indicateurs réalisés sur les animaux ou sur leur environnement le cas échéant pour chacun des critères. Les indicateurs pris en compte sont choisis et décrits dans le référentiel d’étiquetage. Les mesures réalisées sur les animaux (ABM pour animal-based measures) sont indispensables et doivent être prioritaires sur celles des ressources (RBM pour resources-based measures). Cette démarche correspond à l’application de la définition du bien-être des animaux selon l’Anses : « les indicateurs fondés sur l’environnement ne permettent que l’évaluation de la « bientraitance » animale ou la protection animale. Les indicateurs, fondés sur les animaux, évaluent directement l’état de bien-être de l’animal, ils correspondent à l’évaluation d’un résultat et non plus d’un moyen : le bien‑être de l’animal est-il satisfaisant dans les conditions qui lui sont fournies ? Avec les indicateurs fondés sur les animaux, c’est réellement le bien‑être de l’animal qui est évalué et non la perception que l’être humain en a ». Corrélativement, l’indication du seul mode d’élevage (ensemble de ressources fournies par l’humain à l’animal) sur une étiquette ne peut être assimilée à un étiquetage du BEA. Bien que le mode d’élevage puisse correspondre à un potentiel de BEA, il doit être validé par les indicateurs de BEA mesurés sur les animaux. L’agrégation des mesures commence par les mesures individuelles des animaux de l’exploitation pour obtenir finalement un score de BEA pour l’ensemble des animaux. La démarche d’agrégation finale consiste à combiner les deux scores de BEA obtenus séparément sur les exploitations de l’étage de sélection-multiplication et de l’étage de production. […]Le référentiel de classement du score final de BEA se doit d’être multi-niveau. La recommandation de l’Anses est de viser quatre ou cinq niveaux – selon qu’il s’agit d’un dispositif obligatoire ou volontaire – afin de refléter les situations variées des élevages, de permettre la progressivité du système, et aussi de fournir aux consommateurs des informations fiables, faciles à comprendre et hiérarchisables. […]