Type de document : éditorial de Frontiers in Veterinary Science
Auteurs : Richard B. D’Eath, Keelin O’Driscoll, Emma Fàbrega
Extrait en français (traduction) : Editorial : Stratégies holistiques de prévention des morsures de queue chez les porcs ; de la ferme à l’abattoir
Les morsures de queue, d’oreille et de flanc restent des problèmes persistants de production, de santé et de bien-être dans l’industrie porcine mondiale. Ces comportements indésirables de morsure sont difficiles à éviter en raison de leur étiologie multifactorielle, qui nécessite des solutions globales. Malgré l’interdiction de son utilisation systématique dans l’UE, la caudectomie pour réduire les blessures de la queue reste très répandue. Le fil conducteur des études incluses dans ce dossier est la recherche d’un moyen pour loger et gérer les porcs afin de prévenir les morsures de queue sans caudectomie. Le défi est d’autant plus complexe qu’il existe au moins deux types principaux de morsure de la queue : (i) le mordillement en deux temps, où le comportement de recherche de nourriture/exploration réorienté passe de la « queue dans la bouche » à la morsure préjudiciable, et (ii) le mordillement soudain, qui semble être une nouvelle tactique agressive résultant de la frustration de l’accès à des ressources telles que l’alimentation. Les niveaux élevés de morsures répétées (obsessionnels) observés chez certains porcs ont été qualifiés de troisième type distinct par certains auteurs, un quatrième type « épidémique » ayant été identifié par Valros. Deux des études présentées ici ont permis d’identifier le type de morsure de la queue (Bagaria et al.) ou de modifier un facteur de risque pour une forme de morsure (D’Alessio et al.). D’Alessio et al. ont testé l’effet de l’espace à la mangeoire sur les blessures aux oreilles, à la queue et au flanc, ainsi que sur le comportement. […] bien que le risque de morsure soudaine et vigoureuse lié à l’accès à la mangeoire ait été réduit, cela ne s’est pas traduit par une réduction du risque de morsure de la queue dans le reste de l’enclos. Adoptant une approche différente, Bagaria et al. ont étudié les comportements liés à la queue et d’autres comportements chez des porcelets sevrés de moins de 9 semaines […] afin de mieux comprendre le contexte et la cause probable du mordillement de la queue. Même à cet âge précoce, des morsures de queue causant des dommages mineurs ont été observées […] Les porcs qui se mordaient le plus la queue avaient également un comportement exploratoire non agressif, ce qui suggère que les morsures de ces porcs suivaient une étiologie correspondant au modèle de morsure de la queue en « deux étapes ». […] Un autre problème majeur lié au mordillement de la queue est qu’il peut se produire de manière imprévisible. Il peut se produire dans certains groupes et pas dans d’autres dans les mêmes conditions, avec une gravité variable, et il est imprédictible dans le temps, avec des « épidémies » apparemment soudaines, qui s’aggravent ensuite pour toucher beaucoup plus de porcs. La capacité de surveillance automatique, et en particulier de repérer les premiers stades du mordillement de la queue avant qu’il ne devienne trop grave, serait très précieuse, et diverses approches d' »élevage de précision », utilisant la technologie pour surveiller les porcs, ont été essayées. À cette fin, Hakansson et Jensen présentent une nouvelle approche de vision industrielle pour la détection des morsures de queue, basée sur les caractéristiques de l’ensemble de l’enclos des porcs à queue intacte. […] A l’aide d’une autre approche PLF, Larsen et Pedersen présentent une étude détaillée des modes d’abreuvement en groupe chez des porcs en croissance/finition […]. La présence/absence de paille et la caudectomie n’ont pas eu d’effet sur l’utilisation des abreuvoirs, mais une diminution de la densité d’élevage a augmenté à la fois la consommation d’eau et la fréquence d’activation, ce qui suggère que les porcs ayant un espace standard ont pu avoir un accès restreint aux abreuvoirs […].
En résumé, les études incluses dans ce thème de recherche fournissent des informations précieuses sur certains des risques de morsure de la queue, ainsi que sur les méthodes potentielles qui peuvent être utilisées pour prédire et réduire leur occurrence. Malgré les causes profondes et multifactorielles du mordillement de la queue, après des décennies de recherche, on sait aujourd’hui comment le réduire et gérer les porcs avec des queues intactes, par exemple en suivant l’exemple de la Suisse, de la Suède ou de la Finlande. Dans l’Union européenne (et au Royaume-Uni), le problème reste l’absence d’application de l’interdiction de la coupe systématique de la queue et de l’obligation de fournir des matériaux manipulables, ainsi que des réglementations qui autorisent encore des densités de peuplement élevées. En outre, l’utilisation continue de systèmes avec des sols entièrement caillebotis rend difficile la fourniture d’une quantité suffisante de matériaux manipulables en vrac. La caudectomie reste une « solution » bon marché au problème de la morsure de la queue et des incitations économiques à produire des porcs à queue longue peuvent être nécessaires. Des méthodes de normalisation et peut-être d’automatisation de la notation à l’abattoir des queues non caudales et non blessées permettraient de soutenir ces incitations économiques.
Extrait en anglais (original) :Tail biting, as well as ear and flank biting, remain persistent production, health, and welfare concerns in the pig industry globally. These unwanted biting behaviors are difficult to solve due to their multifactorial etiology, requiring holistic solutions. Despite a ban on its routine use in the EU, tail docking to reduce tail injury remains widespread. A common thread of the studies included in this Research Topic is finding a way to house and manage pigs to prevent tail biting without tail docking.The challenge is made more complicated by the existence of at least two main types of tail biting- (i) Two-stage, where re-directed foraging/exploratory behavior escalates from “tail in mouth” to damaging biting, and (ii) Sudden forceful which seems to occur as a novel aggressive tactic through frustration of access to resources such as feed. High levels of persistent biting shown by some individual pigs has been labeled as a distinct third type by some authors (obsessive) with a fourth type “epidemic” being identified by Valros. Two of the studies here involve either identified which type of tail biting is operating (Bagaria et al.) or changed a risk factor for one form of biting (D’Alessio et al.). D’Alessio et al. tested the effect of feeder space on ear, tail and flank injuries and behavior. […] although the risk for sudden forceful biting in relation to feeder access was reduced, this did not translate to reducing the risk of tail biting in the rest of the pen. Taking a different approach, Bagaria et al. studied tail-related and other behaviors in tail-docked weaned piglets under 9 weeks of age […] to better understand the context and likely cause of tail biting. Even at this young age early-stage tail biting which caused minor damage was seen […] Pigs who performed tail biting behaviors the most also performed non-harmful explorative behavior, suggesting that these pigs’ biting followed an etiology corresponding to the “2-stage” model of tail biting. […] Another major challenge of tail biting is that it can occur in unpredictable ways. It can occur in some groups and not others under the same conditions, at varying severity, and it shows unpredictability in time, with apparently sudden “outbreaks” occurring, which then escalate to affect many more pigs. The ability to automatically monitor, and particularly to spot early stages of tail biting before it becomes too severe, would be very valuable, and various “precision livestock farming” approaches, using technology to monitor pigs have been tried. To this end, Hakansson and Jensen present a new machine vision approach to tail biting detection, based on features of the entire pen of undocked pigs. […] Using another PLF approach, Larsen and Pedersen present a detailed study of group drinking patterns in growing/finishing pigs […]. Presence/absence of straw, and tail docking had no effect on drinker use, but a decrease in stocking density increased both water use and activation frequency, suggesting that pigs at the standard space allowance could have had restricted access to the drinkers […].Overall, the studies included in this Research Topic provide valuable insight into some of the risks for tail biting, as well as potential methods that can be used to predict and reduce its occurrence. Despite the multifactorial root causes of tail biting, after decades of research, much is now known about how to reduce it, and to manage pigs with intact tails, for example by following the example of Switzerland , Sweden, or Finland. In the EU (and UK) the problem remains a lack of enforcement of the existing ban on routine tail docking and requirement to provide manipulable materials, and regulations which still allow high stocking densities. In addition, the continued use of systems with fully slatted floors make it challenging to provide sufficient loose manipulable materials. Tail docking remains a cheap “solution” to the problem of tail biting and economic incentives to produce long-tailed pigs may be needed. Methods to standardize and perhaps automate abattoir scoring of undocked and uninjured tails would support such economic incentives.