Type de document : Réponse à la question n°1069 publiée au Journal officiel de la République française
Auteurs : question : Mme Béatrice Roullaud Seine-et-Marne (6e circonscription) – Rassemblement National. Réponse : Ministère de l’Agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt
Question : Mme Béatrice Roullaud alerte Mme la ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt sur la nécessaire et inéluctable transition hors-cage des élevages avicoles. La France se doit d’afficher une position ferme quant à l’interdiction de l’élevage de poules pondeuses en cage et ainsi cesser son double jeu consistant à affirmer détenir l’élevage le plus vertueux au monde tout en maintenant une production d’oeufs de cage. Il faut rappeler que des poules élevées en batteries ne voient pas la lumière du jour, ont des cages de moins de 750 cm2 par animaux, sont sur des sols grillagés, que leurs becs sont brûlés sans anesthésie pour éviter des blessures vu l’exigüité, que certaines perdent leurs plumes et meurent piétinées et qu’en conséquence le risque d’être contaminés par la bactérie Salmonella est beaucoup présent avec des oeufs produits en batterie. C’est ainsi que le système cage a été jugé obsolète et inadapté par l’Autorité européenne de sécurité des aliments (l’EFSA), organe scientifique de la Commission européenne. Néanmoins, alors que l’exécutif européen s’était engagé en 2021 à présenter d’ici fin 2023 une proposition législative visant à améliorer le bien-être des animaux d’élevage, avec notamment l’interdiction des cages à l’horizon 2027, la révision de la législation européenne présentée en octobre 2023 ne contenait aucune proposition sur l’élevage, hormis celles relatives au transport des animaux, au mépris des attentes d’une majorité des Européens. Dans ce contexte, il est fort regrettable d’apprendre que le Conseil d’État a rejeté le 4 décembre 2023 la requête commune portée par neuf organisations de protection animale d’annulation partielle du décret du 15 décembre 2021 portant sur le réaménagement de bâtiments d’élevage de poules pondeuses en cages, faisant ainsi fi de l’avis étayé de la rapporteure publique qui expliquait le 10 novembre que ce décret, en permettant des réinvestissements dans les bâtiments cage pour les poules pondeuses, contrevenait à la loi Egalim de 2018 qui vise, précisément « à mettre fin à l’élevage en cage tout en laissant le temps aux éleveurs de s’adapter à ces changements ». Elle lui demande en conséquence quelles mesures le Gouvernement entend mettre en œuvre pour respecter ses engagements et trouver, avec la filière avicole, les leviers d’accompagnement adéquats pour sortir définitivement du système cages. Alors que l’Allemagne s’est engagée sur cette transition d’ici à 2025, elle lui demande si le Gouvernement est prêt à fixer un cap pour un élevage respectant le bien-être animal, comme la volonté des Français.
Réponse : L’initiative citoyenne européenne (ICE) « End the Cage Age » (Pour une nouvelle ère sans cage) appelle la Commission européenne à proposer une législation interdisant l’utilisation : – des cages pour les poules pondeuses, les lapins, les poulettes, les poulets de chair reproducteurs, les poules pondeuses reproductrices, les cailles, les canards et les oies ; – des cases de mise bas et de stalles pour les truies ; – et des cases individuelles pour les veaux. Dans sa réponse à l’initiative citoyenne européenne, la Commission européenne s’était engagée à présenter une proposition législative visant à supprimer progressivement et finalement interdire l’utilisation de systèmes de cages pour tous les animaux mentionnés dans l’initiative. La France soutient la démarche proposée par la Commission européenne de déterminer les modalités de la suppression progressive des cages, en fonction des avis scientifiques et d’une analyse d’impact. Dans l’attente des projets de règlements européens issus de la révision des textes, la France s’est emparée du sujet. L’amélioration du bien-être des animaux et la lutte contre la maltraitance animale sont des priorités du Gouvernement. Il existe une attente sociétale forte et croissante de la part des consommateurs et des citoyens sur les questions de bien-être animal, il faut y répondre. Plusieurs principes sous-tendent l’action du Gouvernement. Tout d’abord, l’un des enjeux est de prévenir toute distorsion de concurrence. En ce sens deux leviers sont privilégiés : le soutien d’une harmonisation européenne des textes et l’accompagnement du renforcement des exigences relatives au bien-être animal au sein de l’Union européenne de règles équivalentes pour les animaux dont les produits sont importés. Ensuite, la transition a un coût. Ce surcoût doit être partagé avec l’ensemble des maillons des filières d’élevage, dont les distributeurs et les consommateurs. Enfin, le Gouvernement souhaite donner une visibilité suffisante pour les opérateurs, notamment les nouvelles générations, pour qu’ils puissent se projeter et investir. En ce sens, le Gouvernement soutient de nombreux travaux de recherches dont certains vont dans le sens de l’arrêt des cages : – le projet porté par l’institut technique de l’aviculture (ITAVI) pour développer les enclos collectifs d’élevages de lapins à l’engraissement et appuyés par l’annonce ministérielle de soutien public de la filière cunicole à hauteur de 500 000 euros par an faites aux associations de protection et professionnels en septembre 2023. En juin 2023, l’activité d’élevage cunicole faite « hors cages » est estimée à 10-12 % ; – le projet CAREFUL porte un projet de filière sans cage de palmipèdes gras. Des avancées ont déjà été obtenues dans certaines filières ; ainsi, en filière poules pondeuses, l’objectif atteint d’engager une réduction de l’élevage de poules en cages ne cesse de diminuer depuis 2018. Rappelons que dès octobre 2019, le comité national pour la promotion de l’œuf (CNPO) avait annoncé avoir pris de l’avance sur ces engagements qui étaient d’avoir 50 % de poules issues d’élevages alternatifs à la production intensive en cages. À ce jour, les élevages ne cessent de s’adapter et il resterait moins de 33 % de poules pondeuses élevées en cages en France, soit près des 2/3 des poules élevées en systèmes alternatifs à la cage dès 2022, alors qu’au niveau européen ce chiffre n’était que de 58 % en 2021. La France est donc en avance sur ses partenaires européens et en bonne voie vers la fin des poules pondeuses en cages à terme.