Type de document : Réponse écrite publiée dans le Journal officiel de la République française
Auteurs : Question : Vincent Ledoux (Agir ensemble – Nord). Réponse : Ministère de l’agriculture et de l’alimentation
Question : M. Vincent Ledoux appelle l’attention de M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation sur le bien-être des poissons en élevage. Alors qu’il existe une réglementation spécifique au bien-être des animaux terrestres en France, il n’en existe pas concernant le bien-être des poissons. Pourtant, les connaissances scientifiques établissent que les animaux aquatiques d’élevage ont une capacité de souffrance similaire à celle des animaux terrestres. Ainsi, le bien-être des animaux aquatiques d’élevage devrait faire l’objet du même examen et de la même considération que ceux des autres animaux d’élevage, en prenant en compte ces animaux au niveau individuel et non pas uniquement en tant que groupe. Une réglementation spécifique aux espèces, aux stades de vie et aux environnements de détention pourrait être mise en place pour une meilleure prise en compte du bien-être animal. Pour cela, il est nécessaire de s’appuyer sur cinq piliers essentiels. Les animaux aquatiques doivent bénéficier d’un environnement qui réponde aux besoins éthologiques spécifiques de leur espèce d’une manière analogue à la manière dont ils vivraient en liberté dans leur habitat naturel. Une alimentation appropriée est essentielle ; des quantités insuffisantes d’aliments ou des aliments non adaptés peuvent entraîner une mauvaise santé et un mauvais bien-être. Le niveau de densité de peuplement doit être adapté aux espèces et aux stades de vie afin d’éviter les impacts négatifs sur le plan physique, psychologique et comportemental des poissons. La qualité de l’eau doit être vérifiée très régulièrement, notamment le taux d’oxygène ou le potentiel hydrogène. Enfin, tous les poissons devraient être effectivement étourdis avant l’abattage, sans récupération de conscience. Aussi, d’autres préoccupations demeurent essentielles comme le transport ou les traitements médicaux. Ainsi, il lui demande ses intentions concernant la mise en place d’une réglementation spécifique concernant le bien-être des poissons en élevage.
Réponse : L’amélioration des conditions de vie des poissons d’élevage est une nécessité, tant parce que cela répond à une attente sociétale forte que parce que le bien-être des animaux impacte directement leur santé et qu’il est le garant de la qualité des produits proposés au consommateur. Les professionnels de la filière piscicole ont engagé ces dernières années plusieurs actions en faveur de l’amélioration du bien-être de leurs poissons. Ainsi, en 2018, à la suite des états généraux de l’alimentation, les professionnels ont élaboré le premier plan de filière des produits de la pêche maritime, de la pisciculture et de la conchyliculture. Ce plan de filière, élaboré notamment par le CIPA (Comité interprofessionnel des produits de l’aquaculture) identifie le bien-être des poissons d’élevage comme l’un des enjeux prioritaires de la filière pour lequel les efforts doivent être poursuivis. L’action 9 du plan de filière « Développer la recherche et le partage de bonnes pratiques sur le bien-être animal » fait écho à cet engagement. Les travaux vont porter sur la recherche et la formalisation de nouveaux indicateurs du bien-être animal, la construction d’un outil d’aide au pilotage du bien-être animal dans les élevages grâce au travail d’identification des bonnes pratiques. Cet objectif est repris dans le plan stratégique national pour l’aquaculture durable, en cours de révision. Par ailleurs, en février 2019, il a été créé la plateforme « Bien-être des poissons » co-animée par le centre national de référence sur le bien-être animal et le CIPA. Il s’agit là-aussi de travailler à la définition d’indicateurs du bien-être, par espèce et par système d’élevage. Des travaux pour objectiver les effets de la densité et pour évaluer les méthodes d’abattage y sont également conduits. Deux projets ont pu démarrer début 2020 : les premiers indicateurs de bien-être sont expérimentés et une évaluation des pratiques est menée pour identifier celles qui sont potentiellement critiques. En parallèle, des actions de sensibilisation des professionnels sont en cours de réalisation, ainsi que des expérimentations portant sur l’enrichissement du milieu. Par ailleurs l’enjeu que représente le bien-être des poissons d’élevage a été intégré au volet pêche-aquaculture du plan de relance du Gouvernement. La diffusion et le partage des connaissances, notamment dans le domaine du bien-être des animaux d’aquaculture, est en effet l’un des objectifs poursuivis par ce plan. Au plan européen, le bien-être des poisons d’élevage a déjà fait l’objet de deux rapports de la Commission européenne : le premier en septembre 2017, « Bien-être des poissons d’élevage : pratiques courantes de transport et d’abattage » et le deuxième en mars 2018, « Rapport de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur la possibilité d’introduire certaines prescriptions relatives à la protection des poissons au moment de leur mise à mort ». Ce sujet est également depuis 2018 abordé dans la cadre d’une initiative volontaire de membres de la plateforme européenne pour le bien-être animal. C’est dans ce contexte et en tenant compte de ces précédentes recommandations qu’ont été élaborées les lignes directrices stratégiques pour le développement d’une aquaculture européenne durable, publiées le 12 mai 2021, qui serviront notamment à orienter le soutien apporté au secteur aquacole par le futur fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l’aquaculture (FEAMPA). Ce fonds européen sera décliné au niveau national début 2022.