Type de document : Article publié dans Pig333
Auteur : John Pluske
Extrait en français (traduction) : Réduire le stress du sevrage : la socialisation des porcelets avant le sevrage est-elle une stratégie à envisager ?
Le mélange des animaux pendant la lactation est-il bénéfique pour les porcelets à long terme ? Découvrez comment la socialisation influence le comportement et la physiologie des porcs. […]
La pratique courante qui consiste à mélanger des porcelets non familiers (non frères de portée) au moment du sevrage est source d’agressivité et de bagarres, ce qui peut avoir des conséquences négatives sur le bien-être, la santé et les performances, tout en activant les réactions de stress des porcelets. […]
Le concept de socialisation (ou de mélange) des porcelets avant le sevrage, en vue d’obtenir des résultats bénéfiques en termes de bien-être, de santé et/ou de production après le sevrage, n’est pas nécessairement nouveau, puisqu’il remonte à plus de 25 ans. Cependant, sa mise en œuvre à grande échelle a été limitée par des considérations pratiques dans l’environnement des salles de mise bas et peut-être du fait d’une méconnaissance par l’industrie de ses rôles et avantages potentiels dans la production porcine moderne. Néanmoins, et sous l’impulsion de questions telles que la viabilité future de la case de mise bas « traditionnelle », l’accent mis sur le bien-être, l’augmentation de la taille des portées, et notre compréhension de la nécessité pour les porcs nouvellement sevrés de prendre un bon départ dans la maternité, l’intérêt pour ce concept s’est accru récemment. Cela se reflète dans le nombre croissant de publications et d’articles évalués par les pairs parus au cours des 5 à 10 dernières années.
Comment, dès lors, procéder à la socialisation (ou au mélange) des porcelets avant le sevrage ? En pratique, les méthodes de socialisation des porcelets dans les systèmes de production en intérieur ont généralement consisté en :(i) des systèmes qui permettent uniquement aux porcelets de se mélanger tandis que la truie reste enfermée dans sa cage, par exemple en créant des portes pour les porcelets entre les cases de mise bas adjacentes, en supprimant les cloisons entre les cases de mise bas adjacentes, et/ou en donnant accès à une zone supplémentaire pour les porcelets ; ou (ii) des systèmes de logement en groupe (systèmes « multi-suckling »), où les truies et les porcelets peuvent interagir librement, par exemple en retirant une barrière à l’entrée de la case de mise bas, en retirant les cases de mise bas elles-mêmes, ou même en transférant les truies et les porcelets d’un logement individuel à un logement collectif. Dans l’un ou l’autre de ces systèmes, il est possible de retarder l’âge du sevrage, d’augmenter la superficie de l’espace de couchage disponible et d’accoupler les truies pendant la lactation. Comme on peut s’y attendre, les deux types de systèmes présentent de nombreux avantages et inconvénients, et leur mise en œuvre pratique exige une réflexion approfondie compte tenu des investissements (par exemple, en main-d’œuvre, en réaménagement) qui seraient nécessaires. Naturellement, dans les systèmes de production porcine en plein air, certaines de ces contraintes n’existent pas.
Une caractéristique commune du mélange de porcelets non frères de la portée au cours de la lactation est l’augmentation de leur agressivité, avec des perturbations touchant également le comportement de la truie, notamment une atteint possible des trayons, une perturbation de la fréquence des tétées, du comportement de succion des porcelets et une moins bonne croissance des porcelets, mais ces effets ont tendance à être transitoires. A l’opposé, les recherches indiquent que les porcelets socialisés acquièrent des compétences sociales qui leur sont bénéfiques à plus long terme, leur permettant de former plus rapidement des hiérarchies de dominance stables lors de futures rencontres agressives avec des porcs non familiers après le sevrage. En outre, la socialisation des porcelets à un stade précoce de leur vie, en mélangeant les portées avant le sevrage, peut non seulement avoir un effet positif sur le comportement (plus de jeu, moins de combat) et les performances après le sevrage, mais aussi avoir un impact sur la physiologie. Une étude récente menée par Saladrigas-García et collègues (2021) a examiné les effets de la socialisation précoce et de l’enrichissement de l’environnement (avec des jouets) des porcelets de lait sur le microbiote du caecum et les réponses métaboliques avant (-2 jours) et après le sevrage (+ 3 jours). Ces auteurs ont rapporté une absence d’effets de la socialisation et de l’enrichissement avant le sevrage, mais après le sevrage, des différences dans la structure microbienne, une expression jéjunale réduite du gène TLR2 (toll-like receptor 2), un récepteur transmembranaire qui joue un rôle fondamental dans la reconnaissance des pathogènes et l’activation de l’immunité innée, et des diminutions des métabolites, y compris les triglycérides et des acides gras, ont suggéré un impact sur la réduction du métabolisme énergétique compatible avec une réduction des comportements agressifs chez ces animaux.
Dans l’ensemble, les données expérimentales et les expériences anecdotiques semblent indiquer que la création d’un environnement physiquement et socialement enrichi au début de la vie, par exemple par la socialisation ou le mélange, peut modifier positivement les réponses des porcelets par la suite en diminuant les impacts du stress social.
Extrait en anglais (original) : Does co-mingling during lactation benefit piglets in the long term? See how socialisation influences pigs behaviour and physiology. […]
The common practice of mixing unfamiliar (non-littermate) piglets at weaning causes aggression and fighting that can additionally cause adverse welfare, health and performance outcomes, concurrent with activation of the piglets’ stress responses. […]
The concept of pre-weaning socialisation (or co-mingling) of piglets, for beneficial post-weaning welfare, health and (or) production outcomes, is not necessarily new, dating back over 25 years. However, its widespread implementation has been limited by practical considerations in the farrowing room environment and perhaps an unawareness by industry to its potential roles and benefits in modern-day pork production. Nevertheless, and driven by issues including the future viability of the ‘traditional’ farrowing crate, greater emphasis on welfare, increased litter size, and our understanding of the need for newly-weaned pigs to have a good start in the nursery, there has been growing interest in this concept more recently. This is reflected in the growing number of peer-reviewed publications and articles appearing in the last 5-10 years.
How, then, can pre-weaning socialisation (or co-mingling) of piglets be done? Practically, piglet socialisation methods in indoor production systems have typically comprised: (i) systems that allow only the piglets to mix while the sow remains penned in her crate, e.g., by creating piglet doors between adjacent farrowing pens, by removing the partitions between adjacent farrowing pens, and (or) by providing access to an additional piglet area; or (ii) group-housing systems (“multi-suckling” systems), where both sows and piglets can freely interact, e.g., by removing a barrier at the entrance of the farrowing pen, by removing the farrowing pens themselves, or even by transferring sows and piglets from single housing to group housing. In either system, possibilities exist for an extended weaning age, an increase in the available creep space area, and mating of sows during lactation. As would be anticipated, there are numerous advantages and disadvantages associated with both types of systems, and the practical implementation of either requires much consideration and thought given the investments (e.g., in labour, in redesign) that would be required. Naturally, in outdoor pork production systems, some of these constraints do not exist.
A common feature of mixing non-littermate piglets with each other in lactation is increased aggression, with disruptions also to sow behaviour including possible teat damage and suckling frequency, the sucking behaviour of piglets, and poorer piglet growth, but these effects tend to be transitory. To the contrary, findings indicate that socialised piglets learnt social skills which benefited them in the longer term, enabling them to more rapidly form stable dominance hierarchies during future aggressive encounters with unfamiliar pigs after weaning. Furthermore, socialising piglets early in life by mixing litters before weaning not only can have a positive effect on behaviour (more play, less fighting) and performance after weaning, but can also impact physiology. A recent study by Saladrigas‑García and colleagues (2021) examined the impacts of early socialisation and environmental enrichment (with toys) of suckling piglets on the caecal microbiota and metabolic responses before (-2 days) and after weaning (+ 3 days). These authors’ reported a lack of effects of pre-weaning socialisation and enrichment, but after weaning, differences in the microbial structure, a reduced jejunal expression of the TLR2 (toll-like receptor 2) gene, a transmembrane receptor that plays a fundamental role in pathogen recognition and activation of innate immunity, and decreases in metabolites including triglycerides and fatty acids suggested an impact on reduced energy metabolism consistent with a reduction in aggressive behaviours in these animals.
All in all, experimental data and anecdotal experiences would appear to suggest that creating a physically and socially enriched environment in early life, such as by socialisation or co-mingling, can positively modify piglets’ responses after by means of diminishing the impacts of social stress.