Type de document : Article publié dans Le Monde
Auteur : Le Monde avec AFP
Extrait : La proposition de loi va maintenant revenir devant l’Assemblée nationale qui aura le dernier mot, si le désaccord persiste. Les associations de défense des animaux maintiennent la pression.
Le Sénat, dominé par l’opposition de droite, a donné, jeudi 30 septembre, un très large feu vert en première lecture à une proposition de loi pour renforcer la lutte contre la maltraitance animale, mais en maintenant les animaleries et les animaux sauvages dans les cirques itinérants et les delphinariums.
« Ce n’est plus le temps des demi-mesures ou, pire, des faux-semblants », avait affirmé la ministre de la transition écologique Barbara Pompili, au coup d’envoi, dans la matinée, sur ce texte de la majorité présidentielle, qui avait été adopté à la quasi-unanimité en janvier en première lecture par l’Assemblée nationale, dans une version plus offensive.
Députés et sénateurs vont maintenant tenter de trouver un accord en vue d’une adoption définitive et rapide, faute de quoi l’Assemblée nationale aura le dernier mot. Le texte doit notamment contribuer à éviter les achats impulsifs d’animaux de compagnie, qui conduisent à trop d’abandons, et entend aussi durcir les sanctions en cas de maltraitance.
Chaque année, 100 000 bêtes sont abandonnées en France ; rien qu’à l’été 2021, près de 16 900, un nombre record, ont été recueillies par la Société protectrice des animaux (SPA), dont 11 669 chats. La proposition de loi crée un certificat de connaissance et d’engagement, remis lors de l’acquisition d’un animal de compagnie ; il rappellera les obligations de soins, de vaccination et les coûts à prévoir (nourriture, vétérinaire…).
Le Sénat a acté cette « avancée » dans l’Hémicycle, mais est revenu sur l’interdiction programmée de la vente de chats et de chiens dans les animaleries, votée par les députés. En contrepartie, les élus de la Haute Assemblée ont notamment interdit les animaux en vitrine ou l’expédition postale, renforcé la lutte contre les introductions de chiens venus d’Europe de l’Est et introduit un partenariat entre refuges, associations sans refuges et animaleries.
« Il n’y a pas un circuit qui sera plus réglementé », a assuré la présidente de la commission des affaires économiques du Sénat Sophie Primas (Les Républicains, LR), en réponse à ses collègues écologistes et PS qui souhaitaient rétablir l’interdiction de vente.
D’accord sur un nécessaire encadrement de la vente sur Internet, sénateurs et gouvernement ont achoppé dans l’immédiat sur la méthode. Le Sénat a adopté, faute de mieux, un dispositif proposé par la rapporteure (LR, Seine-et-Marne) Anne Chain-Larché et reposant sur un agrément des sites, alors que le gouvernement préconise de n’autoriser la vente que sur des rubriques précises. « C’est une ligne rouge absolue que d’encadrer ces ventes sur Internet », a insisté le ministre de l’agriculture, Julien Denormandie.
Le sort des delphinariums toujours en suspens
Le Sénat a par ailleurs refusé de transformer en obligation la compétence du maire en matière d’identification et de stérilisation des chats errants, sans moyens supplémentaires alloués par l’Etat. Le coût est évalué entre 1,5 milliard et 2,5 milliards d’euros, et le ministère de l’agriculture espère parvenir à « un terrain d’entente » dans la suite de la navette parlementaire.
Dans la soirée, la Haute Assemblée s’est penchée sur l’interdiction progressive de la détention d’animaux sauvages dans les cirques itinérants et dans les delphinariums. La mesure, votée par l’Assemblée nationale, a été retoquée en séance.
En lieu et place, les sénateurs proposent qu’un comité de spécialistes travaille à de nouvelles réglementations pour les delphinariums, qui n’ont actuellement pas de solution pour leurs cétacés. Pour les cirques itinérants, les espèces d’animaux interdits seraient déterminées par arrêté, après avis d’un conseil spécialisé.
« Plutôt qu’une posture idéologique », la rapporteure a défendu un « compromis » et récusé toute « dénaturation ». Mme Pompili avait plus tôt insisté sur la nécessité d’« acter collectivement qu’il n’est plus raisonnable de transporter des éléphants, des otaries ou des fauves de ville en ville » ou encore sur la nécessité de « mettre fin à la présence de dauphins et d’orques » dans les delphinariums.
Dans la dernière ligne droite des échanges, les sénateurs ont toutefois voté l’interdiction sans délai de l’élevage de visons. Chasse à courre, combats de coq, corrida, élevage intensif… La gauche, tout en validant la proposition de loi, a déploré que seules « quelques maltraitances » soient abordées, regrettant de ne pouvoir porter le fer contre « des pratiques d’un autre âge », selon l’écologiste Daniel Salmon (Ille-et-Vilaine).
De leur côté, les associations de protection des animaux maintiennent la pression. Le porte-parole de la Fondation Brigitte Bardot, Christophe Marie, a fustigé « un Sénat rétrograde, incapable de percevoir l’attente sociétale ». La SPA a dénoncé « un rétropédalage dangereux, qui trahit une posture passéiste en matière de respect des animaux ».
La présidente du Parti animaliste, Hélène Thouy, avait réuni dans l’après-midi quelques dizaines de partisans devant le Sénat pour dénoncer « le cynisme et le déni de démocratie qui pèsent sur la condition animale ».
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