Skip to main content

Expertise / Avis

Impacts des sols pleins partiels ou totaux sur le bien-être et le comportement des porcs


Titre complet : Avis du CNR BEA sur les impacts des sols pleins partiels ou totaux sur le comportement des porcs
Commanditaire
: Compassion In World Farming (CIWF) France, Welfarm, Oeuvre d’Assistance aux Bêtes d’Abattoirs (OABA), La Fondation Droit Animal Éthique et Sciences (LFDA)
Date de saisine : 16/11/2023
Date de rendu : 30/09/2024
Date de dernière modification : 04/11/2024

Contexte de la saisine

La Directive 2008/120/CE du Conseil interdit la pratique systématique de la caudectomie (section partielle de la queue) des porcelets, qui peut être réalisée seulement lorsque des phénomènes de caudophagie (morsures de la queue) sont avérés dans l’élevage, malgré des dispositions prises en amont pour les éviter. Quatre associations de protection animale (CIWF France, Welfarm, OABA, LFDA) ont fait remonter les constats suivants auprès du CNR BEA :

  • Les problèmes de caudophagie persistent en élevage porcin
  • La caudectomie est encore pratiquée de façon systématique malgré la Directive 2008/120/CE
  • L’apport de matériaux manipulables permet aux porcs d’exprimer leur comportement exploratoire et donc de limiter la caudophagie
  • L’apport de matériaux manipulables permet aux truies d’exprimer leur comportement de nidification
  • Le caillebotis intégral, type de sol majoritaire en élevage porcin, rend difficile l’apport de matériaux manipulables dans les bâtiments d’élevage

Les quatre associations de protection animale, en tant que membres du Comité Consultatif du CNR BEA, ont saisi le CNR BEA pour répondre à la question suivante : « Quelles sont les conséquences des différents types de sols pleins (partiel/total) avec ou sans litière/matériaux manipulables (et de nidification) sur le bien-être des porcs, en particulier sur leur comportement (manipulation, exploration, posture, interactions entre les animaux, comportement maternel) ? La réponse du CNR BEA considérera toutes les catégories d’animaux et tous les stades de développement en filière porcine. » Des questions sous-jacentes ont également été formulées, et notamment : « Quels sont les facteurs permettant un usage optimal des sols alternatifs au caillebotis intégral en élevage porcin ? Quels sont les freins et leviers respectifs à leur déploiement en élevage porcin ? »

Principales conclusions du CNR BEA

Impacts des sols alternatifs au caillebotis intégral sur les comportements d’exploration et de nidification

Les sols alternatifs au caillebotis intégral sont :

  • le caillebotis partiel (sol partiellement plein)
  • le sol plein nu
  • le sol plein à litière raclée (paillage d’entretien et raclage régulier)
  • le sol plein avec litière profonde (apport initial d’une grande quantité de substrat puis apport régulier)

Les systèmes optimisant le bien-être des porcs sont les sols pleins avec litière raclée ou avec litière profonde. Ces systèmes améliorent le bien-être des porcs car ils sont compatibles avec la distribution de grandes quantité de litières ou de fourrages.

Or, les litières et fourrages comme la paille non hachée fournie en longues tiges (tiges > 7 cm) sont les matériaux les plus efficaces pour permettre aux porcs d’exprimer des comportements d’exploration et de fouissage et pour éviter l’apparition de comportements indésirables orientés vers les congénères tels que la caudophagie. Fournir 20 g de paille par porc et par jour permet de réduire la caudophagie, et cet effet positif s’accroît avec la quantité fournie. Le comportement exploratoire des porcs est satisfait avec 200 g/porc/jour. La quantité optimale pour prévenir la caudophagie serait de 400 g/porc/jour.

Pour les truies péri-partum, l’apport de paille fournie en longues tiges (> 10 cm) répond de façon optimale au besoin de construction du nid des truies. Une quantité de fourrage supérieure à 2 kg par truie fournie 24 heures avant la mise-bas permet de répondre au mieux à ce besoin.

Le caillebotis intégral ne permet pas l’apport d’une quantité suffisante de fourrages car ils risquent d’obstruer les interstices entre les caillebotis et de boucher le système d’évacuation du lisier. Le caillebotis partiel est plus adapté à la distribution de paille que le caillebotis intégral, sans être optimal.

Le CNR BEA recommande donc de privilégier les types de sols totalement compatibles avec l’apport de litières et fourrages en longues tiges en grandes quantités, à savoir les sols pleins, lors de la conception de nouveaux, ou la rénovation d’anciens bâtiments.

Comme les bâtiments en caillebotis intégral restent les plus courants en élevages porcins en France, la synthèse propose des pistes d’améliorations des pratiques d’élevage et des bâtiments conçus sur caillebotis du point de vue des animaux, en attendant leur remplacement lors de la rénovation des bâtiments.

Autres effets des sols pleins sur le bien-être des porcs

Par rapport au caillebotis intégral, les sols pleins ou partiellement pleins augmentent le confort de couchage et le confort thermique en période de basses températures, donnent la possibilité d’établir des aires fonctionnelles séparées, du fait de l’espace disponible plus important, et sont associés à la réduction de l’incidence des lésions et blessures aux pattes et des boiteries.

L’impact positif sur ces critères de bien-être augmente selon un gradient (caillebotis intégral < caillebotis partiel < sol plein nu < litière raclée < litière profonde) qui est associé à la quantité de fourrages fournie.

Mais les sols alternatifs nécessitent une meilleure gestion de l’ambiance du bâtiment (ventilation) et plus de surfaces disponibles que le caillebotis intégral pour maintenir la propreté des animaux et des enclos, assurer le confort thermique en période chaude, et prévenir le risque de maladies infectieuses.

Freins et leviers au déploiement des alternatives au caillebotis intégral

Le rapport d’expertise comporte un tableau résumant les freins et leviers au développement des alternatives au caillebotis intégral, qui sont essentiellement liés à des aspects socio-économiques et environnementaux. Pour lever les réticences de certains éleveurs sur la rentabilité et la faisabilité technique du passage à un système d’élevage alternatif, les principaux leviers identifiés incluent le partage d’expériences réussies, la formation, la diffusion des résultats de recherche et développement, et l’aide financière des collectivités locales et de l’Etat.